PLOAA jamais sans la bio : la Fnab présente 5 propositions

Le 12/07/2023 à 12:30 par La rédaction


Lancée par le ministère de l’Agriculture, la concertation entamée depuis six mois sur le Pacte et la nouvelle Loi d’orientation et d’avenir agricole – PLOAA - s’est achevée fin juin. Intégrée aux groupes de réflexion, la Fnab réclame une meilleure prise en compte de l’agriculture bio, sur les trois axes prioritaires : orientation et formation, installation et transmission, adaptation et transition face aux changements climatiques.

 

« Cette LOAA sera discutée à la rentrée, et ce grand projet pour l’agriculture française ne peut se faire sans l’agriculture bio et résiliente, affirme Philippe Camburet, président de la Fnab. D’autant plus qu’elle représente aujourd’hui plus de 16 % des emplois agricoles. » En une dizaine d’années, la bio s’est imposée dans le paysage agricole français. « Ce mode de production suscite de nombreuses vocations, également chez les porteur.euses de projet non issus du milieu agricole, qui représentent 60 % des candidat.es à l’installation. » Selon les chiffres du recensement agricole, 25 % des nouvelles installations se sont faites en bio entre 2010 et 2020, rappelle la Fnab.

« Malgré ce pouvoir d’attraction, et alors que le renouvellement des générations agricoles est l’un des enjeux majeurs de ces prochaines années, s’installer en bio reste un parcours du combattant ! » , pointe Philippe Camburet. Se former n’est pas facile, car la bio est quasiment absente des programmes de l’enseignement agricole. « Quant au parcours officiel à l’installation, il ne répond généralement pas à leurs attentes, les spécificités de la bio étant rarement prises en compte. » Pour la Fnab, au-delà des aides à l’installation et à la conversion, tout l’environnement des candidats à l’installation doit être revu afin d’atteindre l’objectif gouvernemental de 18 % des surfaces agricoles en bio en 2027. D’où les cinq demandes en faveur de l’agriculture bio à intégrer dans la LOAA.

 

Orientation et formation

Un constat : l’agriculture bio n’est pas mentionnée dans les référentiels de l’enseignement agricole alors qu’elle suscite de nombreuses vocations. Suivant les régions, entre 30 % et 50 % des porteurs de projet souhaitent s’installer en bio, selon les données recueillies par les points d'accueil Installation Transmission (PAIT). Mais beaucoup de dossiers n’aboutissent pas. « Pour s’installer dans de bonnes conditions, pouvoir se former est essentiel, que ce soit en formation initiale ou continue » , rappelle la Fnab.

L’approche systémique et des techniques de la bio peuvent aussi inspirer tous les agriculteurs, quel que soit leur mode de production. Or dans les lycées agricoles, l’enseignement de la bio est laissé à la discrétion des enseignants et des établissements. « D’où les difficultés à acquérir les connaissances nécessaires pour s’installer. » La seule obligation ministérielle nationale stipule que « l’agroécologie doit être intégrée dans tous les modules de formation » . Mais sans précision de durée, sans programme, ni définition précise de l’agroécologie.

« Et la bio n’est pratiquement pas mentionnée, alors qu’elle est la démarche agroenvironnementale la plus aboutie et la seule à bénéficier d’un label européen », rappelle la Fnab. Par ailleurs, faute d’obligation nationale, les enseignants n’ont pas les ressources nécessaires pour l’enseigner : 72 % déclarent ainsi avoir besoin de plus de contenus techniques, selon une enquête Fnab de 2020. Certains établissements font des efforts : s’il existe en France 81 formations à orientation bio, celles-ci ne représentent que 5 % des 1 614 formations « production » de l’enseignement agricole public. Et leur répartition est inégale : 23 % des BPREA sont à orientation bio, mais les CAP à orientation bio sont quasi inexistants.

Demande n° 1 : la LOAA doit rendre obligatoire dans l’enseignement agricole un module équivalent à 3 heures par semaine sur l’agriculture bio, afin de mettre les étudiants en capacité de concevoir une approche système sur la ferme.

 

Installation et transmission

« S’installer en bio demande d’être correctement accompagné. Cela est d’autant plus nécessaire pour les nombreux porteurs de projet bio non issus du milieu agricole », rappelle la Fnab. Or le parcours officiel à l’installation ne répond pas à leurs besoins. Le Plan de professionnalisation personnalisé (PPP), obligatoire pour l’obtention des aides à l’installation, ne prévoit pas d’aborder l’agriculture bio au cours du stage de 21 heures, ni que les structures spécialisées en bio accompagnent les candidats.

Demande n° 2 : La LOAA va être l’occasion de modifier le parcours d’accompagnement à l’installation, dans lequel l’agriculture bio est aujourd’hui sous-représentée. La Fnab demande que le futur parcours à l’installation propose systématiquement un accompagnement par une structure spécialisée dans l’agriculture bio.

Alors que l’accès au foncier est un enjeu majeur pour s’installer en bio, chaque année des fermes labellisées sont déconverties lors de leur reprise. « C’est une anomalie au regard des enjeux environnementaux et des finances publiques, des aides ayant été versées pour la conversion et le maintien en bio des surfaces concernées », pointe la Fnab. Certes, quand les Safer préemptent du foncier en bio, elles ont l’obligation de le rétrocéder aux candidats à l’installation en bio. Mais 60 % du foncier agricole est en fermage et échappe à cette possibilité de préemption.

Demande n° 3  : cette règle soit être élargie à 100 % des terres agricoles, même au fermage, pour rendre les porteurs de projet en bio prioritaires au moment de l’attribution des autorisations d’exploiter. Ce, afin de garantir effectivement le maintien des terres bio en bio.

 

Changement climatique

L’adaptation au changement climatique est un défi majeur face auquel la bio présente de très nombreux atouts, en termes de stockage carbone, de gestion et de préservation de la ressource en eau et de résilience. Mais, malgré les travaux de l’Itab et les programmes de l’Inrae sur la bio, les données demeurent trop parcellaires.

« Il est donc primordial que la recherche contribue à mieux caractériser les bénéfices techniques de la bio afin, notamment, de mieux accompagner les nouveaux installés , soutient la Fnab. Climae, le programme phare de l’Inrae sur la transition agroécologique ne comprend aucune étude spécifique sur la bio.  » Autre programme phare, Metabio sur les impacts d’une augmentation notable des surfaces cultivées en bio, ne présente aucun volet visant à caractériser les atouts de la bio face aux bouleversements climatiques.

Demande n° 4  : l’État doit inciter le secteur de la recherche agricole à mieux caractériser la résilience des techniques agricoles bio quant à la gestion quantitative de l’eau et l’adaptation aux bouleversements climatiques.

Favoriser la transition de l’agriculture dans un contexte de changement climatique est l’un des grands objectifs de la future LOAA. « Mais cette entrée climat ne peut être abordée sous le seul angle des émissions de gaz à effet de serre, pointe la Fnab. Elle doit être pensée en lien avec les problématiques de la préservation de la ressource en eau et de la biodiversité. » Le modèle bio repose sur une approche systémique prenant en compte les interactions entre biodiversité, eau et climat. Or, les outils de diagnostic climat aujourd’hui utilisés s’attachent uniquement à l’enjeu des gaz à effet de serre, ce qui est un non-sens pour la bio. En outre, ces diagnostics n’induisent pas de changements structurels et systémiques des pratiques agricoles et peuvent favoriser des méthodes présentant des risques pour la biodiversité et l’adaptation des fermes au changement climatique.

Demande n° 5  : Le virage de la transition voulu par la LOAA doit se faire avec des outils adaptés, répondant à des enjeux systémiques. Les diagnostics climatiques, obligatoires au moment de l’installation ou de la transmission, doivent être réalisés par des techniciens dédiés à la bio avec des outils adaptés à la bio.

La LOAA va être l’occasion de modifier le parcours d’accompagnement à l’installation, dans lequel l’agriculture bio est aujourd’hui sous-représentée. (©CRF)