2018, l’année de la reconnaissance des services rendus ?

Le 09/01/2018 à 11:35 par La rédaction


(© Digitalis)

EDITO, BIOFIL n°115 - janvier / février 2018

Si la bio progresse, le rouleau compresseur est toujours là, insidieux, sournois, puissant…
Preuve en est, la reculade du coton bio en Inde, suite à l’émergence du label vert BCI – Better cotton initiative – qui, très laxiste, est désormais préféré au cahier des charges bio (1). Une opération greenwashing, très marketée par les grandes enseignes de distribution de textile… Et son succès s’explique par des règles de production beaucoup moins contraignantes. Est-ce un signal clignotant inquiétant pour l’avenir de l’agriculture bio ?
En France, entre les États généraux de l’alimentation (EGA) clôturés fin décembre 2017 et les débats sur l’évolution de la Pac horizon 2020-2026, on n’a jamais autant parlé de protection de l’environnement, de lutte contre le changement climatique, de sauvegarde de la biodiversité, de protection des ressources naturelles – sol, eau, air –, du bien-être animal, de bioéconomie, d’économie circulaire et solidaire, de prix justes, de répartition équitable de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne, de vitalité des territoires On ne peut que s’en réjouir et applaudir : les intentions n’ont jamais été aussi clairement exprimées pour stimuler et accompagner la transition agricole vers des pratiques plus vertueuses et résilientes.
Et la bio dans tout ça ? La vigilance s’impose. Si elle est considérée et valorisée – désormais partout et haut et fort – comme la première de cordée, la locomotive, l’excellence, le modèle exemplaire, le laboratoire innovant… de l’agriculture, elle peut se faire quelques soucis. L’injonction de “ne pas opposer les agricultures” répétée sans cesse par les instances dirigeantes est louable, si on considère que chacun doit tracer son chemin à son rythme. Mais pas s’il s’agit de protéger un modèle hyper-intensif et gourmand en intrants chimiques de synthèse, verdi par l’agroécologie.
Plébiscitée par les citoyens, la bio a plus que jamais besoin d’être soutenue par les pouvoirs publics, car on le sait, seul, le marché n’est pas suffisant pour la rendre efficiente et durable. Elle doit bénéficier en priorité de la rémunération des services environnementaux rendus sur les territoires, promise par les EGA et énoncée comme un axe de la nouvelle Pac 2020. Car ces services rendus à l’environnement par la bio ont été répertoriés, évalués, validés (2). Ils sont bien réels, fruits d’années de progrès techniques bio basés sur l’agronomie et sans produits chimiques de synthèse. L’aide au maintien jouait ce rôle, en étant dédiée à la bio. La nouvelle mesure annoncée le serat- elle ? Pour l’instant, rien de plus n’a encore filtré sur ses modalités.
La bonne nouvelle de ces EGA, c’est l’objectif annoncé d’atteindre 15 % de la surface agricole en bio d’ici 2020. Pour réussir, le nouveau plan Ambition bio sur cinq ans promis par le premier ministre le 21 décembre est donc très attendu. Tous les professionnels de la filière sont à pied d’oeuvre pour participer à sa co-construction en lien avec l’État, les Régions et les Agences de l’eau. Les défis sont nombreux : déployer la bio sur les territoires, consolider les filières, et augmenter l’offre de produits locaux bio, notamment en restauration collective. Mais cela implique des soutiens financiers ciblés et efficaces. Alors espérons que 2018 sera l’année de la bio !
Christine Rivry-Fournier
(1) Démarche dénoncée par Cash Investigation Coton du 27 novembre 2017.
(2) Rapport de l’Itab et de l’Inra décembre 2016.