[Édito du Biofil n°160 associé au Vitisbio n°25 – juillet - août 2025].
L’été 2025 va laisser des traces, devenu étouffant… pour la bio, la santé, l’environnement et le climat ! En plus d’une canicule hors normes, la loi Duplomb, votée le 8 juillet, attise les débats brûlants et pointe le fossé – toujours plus large – divisant les agriculteurs·trices sur leurs modèles de production et les Français sur l’écologie. Dans ce brasier, l’alerte rouge du dépassement retentit le 24 juillet 2025, date à laquelle notre terre a consommé toutes ses réserves annuelles. Elle arrive huit jours plus tôt que l’an dernier. Encore un triste record : l’humanité ingurgite désormais l’équivalent de deux planètes en 365 jours !
Le sursaut citoyen lancé par la pétition d’une jeune étudiante bordelaise de 23 ans, récoltant plus de 2 millions de signatures dès fin juillet, confirme et cristallise l’incompréhension, l’inquiétude, voire l’angoisse d’une grande partie des nouvelles générations face à ces voltefaces. Outre le fait d’avoir été adoptée en force sous la pression des lobbies industriels de l’agrochimie, notamment du sucre de betterave, ce texte piétine les efforts de ces dernières années pour réduire les dégâts générés par les pratiques intensives à base d’engrais et de pesticides de synthèse.
Cette loi ne résout en rien le malaise profond du monde agricole, et les enjeux de la rémunération et du renouvellement des générations. Elle valide les rétropédalages sur les alternatives agroécologiques. L’agriculture bio est directement dans le viseur. La saignée drastique de 64 % du budget de l’Agence Bio le prouve – touchant la communication dont l’arrêt de sa campagne à la télé, ainsi que l’aide aux projets de structuration via le fonds Avenir Bio. En toile de fond, la volonté d’éliminer cette structure dédiée en l’intégrant à France Agrimer, donc de l’invisibiliser. Le coup de pouce à l’écorégime bio, rendu possible à la mi-parcours de la Pac, n’est pas non plus à la hauteur des attentes. La bio s’est vu souffler les trois quarts du reliquat de l’enveloppe non utilisée de la mesure Cab – conversion à l’agriculture bio.
Pourtant, l’agriculture bio ne cesse de le démontrer : elle est à la fois le laboratoire et la locomotive de la production agricole et alimentaire la plus propre possible. Fin 2024, selon l’observatoire de l’Agence Bio, la bio s’impose dans 14,9 % des fermes françaises (+1,6 % vs 2023), et sur 10,1 % de la SAU nationale (-2 % vs 2023), pour un marché de 12,2 Md€. Malgré la pression de certains pour le supprimer, l’objectif inscrit dans la loi d’Orientation agricole de 2025 reste d’atteindre 21 % de des surfaces en bio en 2030 en favorisant l’installation économiquement viable d’exploitations agricoles en bio. Alors, pourquoi freiner la bio des quatre fers ?
Après l’été, la rentrée risque de sentir le roussi, même si les opérateurs engagés en bio, cherchent à convaincre sans soumettre, toujours en action. Leurs services rendus – environnementaux et sociaux – sont précieux, quantifiés par l’Itab – Institut technique de la bio –, pour la qualité de l’eau, la biodiversité, les sols, le climat, la santé, le commerce équitable… Mais ils doivent être reconnus, soutenus par l’Union européenne, les États, et rémunérés par la société. Il faut INLASSABLEMENT continuer à communiquer en toute transparence sur la bio, en boostant la consommation qui repart. Les nombreux salons de la rentrée en sont l’occasion, notamment Tech&Bio, rendez-vous professionnel international incontournable… Biofil et Vitisbio, réunis exceptionnellement dans ce numéro double, y seront présents pour témoigner de la combativité et de l’inventivité de la filière.
Christine Rivry